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bruno barbieri sculpteur savoie

L'alchimiste des corps parfaits du sculpteur Bruno Barbieri

Dans son atelier des Chapelles, Le sculpteur Bruno Barbieri joue les apprentis sorciers. Sous le velours de son doigté s'élancent les formes délicieuses de la femme dans toute sa beauté, nue et aimante. Une très belle rencontre.

Il y a une dizaine d'années, sa forêt était de pierre et d'acier, les arbres en verre, les branches en béton. Une jungle oppressante et tonitruante dont les lianes envahissantes ont fini par le lasser : "Je ne supportais plus Paris. Puis, j'ai bénéficié d'une belle opportunité pour déménager en Tarentaise, une possibilité qui m'a fait m'installer définitivement ici. Dans la capitale, la lumière était grise, ici, elle irradie et transcende le travail du bois et de la terre".

Dans la sculpture, j'aime travailler les corps

Sorte de magicien du ciseau à bois, Bruno Barbieri exhale, des racines de buis ou de tilleul, fées malicieuses et déesses délicieuses. Sous la gouge ou la caresse de ses doigts, les corps prennent forme, épousent une perfection élégante, les seins se dessinent, les sexes s'exhibent, sans vulgarité, adoucis par une beauté pure et naturelle. J'aime travailler les corps, consent Bruno Barbieri, celui de la femme m'inspire, il n'y a rien de plus beau que les formes de la femme, elles m'inspirent la sensualité, la sexualité, des sentiments naturels dont je n'ai pas une vision puritaine… je ne vois pas pourquoi on occulterait cette force cosmique majeure".

Sculpture du bois et façonnage de la terre

Aussi à l'aise dans le travail du bois que celui de la terre, Bruno Barbieri reconnaît que l'approche artistique diffère : "Ciseler un morceau de chêne au burin est un exercice physique, on tape, on rabote pour enlever la matière. Le travail de la terre fait davantage appel aux sensations de l'enfance, à cette pâte à modeler qu'il faut triturer et caresser avant que ne se matérialise l'objet de nos désirs : on retire de la matière, mais on en ajoute parfois aussi".
Plus occasionnellement, il réalise des bronzes, satisfaisant ainsi les préférences d'une clientèle d'amateurs d'art pour laquelle cette matière est plus noble.

Sculpture de Bruno Barbierie Powerwoman

La sculpture est vitale

Chaque jour, il façonne huit heures durant, s'évade incessamment pour la pratique d'une discipline qu'il qualifie d'obsessionnelle et viscérale : "La sculpture est vitale pour mon équilibre physique. Pour moi, cet art est une période où on cherche à entrer en soi, et un moment où on atteint un état de transe. Ce n'est pas systématique, je dirais même que les ¾ de mon travail sont réalisés dans le labeur, mais on vit pour que ce miracle se produise. Il existe une dimension spirituelle et mystique évidente dans ma démarche".

La sculpture : Dimension spirituelle

Pour mieux illustrer cette impression, il évoque une anecdote émouvante : "Bernard Taillefer, l'architecte de la station des Arcs, était un grand ami. Avant de mourir, il m'avait laissé trois morceaux de bois… Pendant un petit moment, ils ont trainé dans mon atelier, mais je ne les ai jamais oubliés, et en son souvenir, j'ai fini par les travailler. À ce jour, j'estime qu'ils ont généré mes trois plus belles pièces, je suis sûr que sa mémoire m'a guidé dans la création".

Chaque artiste a son ego

Bruno expose rarement, ne court pratiquement plus les foires artisanales comme il pouvait le faire à ses débuts en Savoie : "Je participais à beaucoup d'entre elles, mais vendais peu, les gens n'attendent pas de trouver en ces lieux, ce que je cisèle".
Au demeurant, la célébrité ne l'attire pas plus que ça "Chaque artiste a son ego, j'ai le mien, mais je crois que la reconnaissance est à double tranchant, elle peut nous emprisonner dans un cadre, nous cantonner à une seule forme d'expression imposée, ce que je ne veux pas… en tout cas, c'est la seule raison que je me trouve !" Est-ce la bonne, à vous d'en juger…

Johan Fabin (journaliste)